Brièvement : la guerre de Sept Ans (1756-1763)

Brièvement : la guerre de Sept Ans (1756-1763)

Dès son sacre, Louis XV essaya de faire régner la paix en Europe, surtout entre la France et la Grande-Bretagne, se refusant à toute annexion ou provocation. Pourtant, la France, alliée traditionnelle de la Prusse et la Grande-Bretagne, alliée historique de l’Autriche, se trouvèrent dans des camps opposés lors de la guerre de Succession d’Autriche (1740-1748). En Europe, seules la Prusse et l’Autriche croisèrent le fer pour la possession de la riche Silésie. Dans le monde en revanche, particulièrement en Amérique du Nord et en Inde, des échauffourées franco-britanniques eurent lieu. Les tensions coloniales, en réalité présentes depuis la guerre de Succession d’Espagne (1701-1713), en étaient exacerbées. La paix d’Aix-la-Chapelle (1748) n’apportait pas une solution claire et pérenne.

Les colonies en Amérique du Nord

Dès 1754, les hostilités reprirent dans le Nouveau-Monde entre colons britanniques, colons français et tribus amérindiennes. C’est en 1754 que la guerre de Sept Ans commença réellement avec « l’attentat » d’une troupe de George Washington sur celle d’un capitaine français et de ses hommes, pourtant simples messagers et, plus tard, la piraterie de l’amiral britannique Boscawen au large de la côte Est américaine, interceptant un convoi français. Dès lors, cette guerre non déclarée mais déjà consumée vivait du zèle de Londres qui voulait s’imposer face à la Nouvelle-France (le Canada français) et mettre Louis XV devant le fait accompli. Ce dernier cherchait encore l’apaisement. Une volonté dont il ne se départit pas même lorsque Londres organisa une grande offensive dans les règles de l’art au Nouveau-Monde. Offensive qui échoua lamentablement devant les Français et les Amérindiens pourtant en net sous-nombre.

Les deux alliances mondiales (Espagne et Portugal compris)

De ce fait, la Grande-Bretagne de George II se trouvait isolée sur la scène internationale et, surtout, européenne, car désignée du doigt pour ses honteuses manières alors qu’officiellement en paix. La cour de Saint James procéda alors à une vaste offensive diplomatique en Europe. Profitant de l’essoufflement de l’alliance franco-prussienne, Londres fit alliance avec la Russie contre la Prusse. Cela dans le but de faire peur à la Prusse, permettant une alliance prusso-britannique. Le premier acte de la révolution diplomatique était achevé. Versailles et Vienne, déjà en discussions secrètes pour une éventuelle alliance, officialisèrent alors leurs tractations. Pour Versailles, en effet, s’allier à Vienne alors qu’allié avec Berlin dont l’ennemi viscéral n’était autre que l’Autriche était impossible, d’où l’hésitation de Louis XV. Une fois l’alliance franco-prussienne brisée pour une alliance prusso-britannique, Louis XV n’avait plus de raison de refuser l’alliance avec l’Autriche. Pour compléter ce renversement spectaculaire des alliances européennes, l’Autriche et la France s’allièrent avec la Russie tsariste, qui menait depuis longtemps une politique occidentale et s’inquiétait de la montée en puissance de la Prusse. C’est pourquoi Moscou avait accepté une alliance avec Londres contre Berlin. Mais, ayant été bernée par Londres qui ne cherchait qu’à faire peur à Frédéric II de Prusse pour s’en faire un allié, la tsarine Elisabeth Iere avait des raisons d’être furieuse et aucune de refuser une alliance avec Vienne et Versailles dont le principe restait globalement similaire. La question est ici : pourquoi George II souhaitait une alliance avec Frédéric II de Prusse ? La réponse réside dans le titre complet du souverain britannique : George II de Hanovre. Le Hanovre étant une terre allemande située entre la Prusse et la France, faire la guerre aux deux signifiait l’abandon de cette terre que George aimait tant.

La révolution diplomatique passée, la guerre fut déclarée en bonne et due forme en 1756. La Grande-Bretagne ne faisait réellement la guerre qu’à Versailles, tout comme l’Autriche et la Russie ne la faisaient qu’à Berlin. Louis XV, lui, faisait la guerre à la Grande-Bretagne et à la Prusse et finançait largement ses alliés, dispersant ses forces ! En 1756 et 1757 pourtant, la France mena les débats en Amérique du Nord et en prenant Majorque aux Britanniques après une diversion de débarquement en Angleterre. Les Treize colonies ne passèrent pas loin de l’annihilation et ne durent leur salut qu’à la mésentente entre les chefs français ainsi que les manières, considérées barbares, des Amérindiens, largement alliés des Français. La France s’engagea alors dans une politique militaire résolument continentale, constituant l’armée de Westphalie pour envahir le Hanovre britannique et ensuite fondre sur les arrières de la Prusse. La Grande-Bretagne, en élisant le patriote William Pitt Premier ministre, décida de la stratégie diamétralement opposée : maritime et coloniale.

En Europe centrale, les armées autrichiennes, russes et prussiennes étaient aux prises sans qu’aucun résultat décisif ne vienne clôturer les débats. Frédéric II de Prusse se débrouilla pour toujours s’en tirer in extremis, voyant son armée constamment saignée à blanc mais disposant d’une population belliqueuse et prête à combler les trous. Le roi de Prusse fut sauvé par sa population, son talent militaire, l’arrivée de l’hiver à chaque campagne, l’absence de coordination entre l’Autriche et la Russie, le manque de combattivité dont fit parfois preuve cette dernière mais également de l’incompétence française, dont l’armée de Westphalie, bien qu’envahissant tous les ans le Hanovre, ne parvenait pas à constituer une réelle menace sur les arrières de la Prusse.

Les comptoirs commerciaux français (rouge) et britanniques (noir)

La supériorité de la Royale Navy britannique sur la Royale française et la politique continentale que s’échignait à suivre la France eurent tôt fait de condamner la Nouvelle-France et les comptoirs commerciaux d’Inde. Dès 1758, le temps français étant passé, la perfide Albion domina partout sauf en Europe. D’abord, Pitt dispensa les Treize colonies d’impôts et avança des fonds pour équiper les soldats, excellente décision ayant pour conséquence un zèle décuplé des colons qui, dès 1758, menèrent la contre-attaque contre la Nouvelle-France en Amérique du Nord. En parallèle, la Compagnie française des Indes Orientales (contrôlant les comptoirs commerciaux français d’Inde) remplaçait Dupleix, un homme politiquement et militairement efficace, pour le remplacer par un homme qui n’aurait pas les mêmes ambitions. La guerre est mauvaise pour les affaires ! Pourtant, la East India Company, pendant anglais de la société française, décida elle d’adopter l’exemple de Dupleix … Contre la France. Le succès fut au rendez-vous, dès 1756 et 1757, et se solda par la chute de Pondichéry en 1760.

Alors que l’Inde tombait pour partie dans l’escarcelle britannique, il en allait de même pour les possessions françaises dans les Caraïbes et même en Afrique. Le pire restait cependant l’Amérique du Nord : le Canada français tomba, avec Montréal, malgré une belle défense du général Lévis, en 1760. Sérieusement amputée dans son empire, essuyant les échecs récurrents de son armée de Westphalie, la France, par la détermination de sa tête à penser, le cardinal de Choiseul, principal ministre, relança la guerre de Sept Ans : l’Espagne entrait dans la danse en 1761. Charles III d’Espagne venait d’être couronné et appréciait moyennement le traitement hautain que lui réservait la Grande-Bretagne. Affronter le Portugal était l’une des promesses de cette entrée en guerre, jetant ce dernier dans le camp britannique. L’Espagne pouvait mettre une flotte puissante à disposition des Français, ce qui inquiéta un temps la Royale Navy. L’expédition contre le Portugal fut un fiasco, la Royale Navy resta reine des océans, l’Espagne perdit Cuba, échec et mat.

Carte récapitulative de la guerre de Sept Ans, les grandes batailles et les alliances

En Europe centrale, la Prusse était au bord du gouffre : la chance la sauva. En janvier 1762, Elisabeth Iere expira, laissant son trône au désormais tsar Pierre III, farouchement prussophile dans un pays prussophobe et idolâtrant Frédéric II de Prusse ! La paix fut signée de suite. Catherine II de Russie renversa son mari, Pierre III, très rapidement. Mais le mal était fait : la Russie n’allait pas se relancer dans la guerre. Le 10 février 1763, le traité de Paris fut signé : la guerre était terminée. La Grande-Bretagne prit le Canada français, la Floride espagnole et une influence incontestée en Inde. La France livra la Louisiane à l’Espagne pour qu’elle accepte le sacrifice de la Floride. Quelques îles des Caraïbes furent perdues aux britanniques. La paix fut signée entre la Prusse et l’Autriche : on revenait aux possessions de 1756, tout ceci fut inutile.

Figures historiques principales :

Louis XV : roi de France (règne : 1715-1774)

Frédéric II de Prusse : roi de Prusse (1740-1772)

George II de Hanovre : roi d’Angleterre (1727-1760)

George III de Hanovre : roi d’Angleterre (1760-

Marie-Thérèse d’Autriche : impératrice d’Autriche (1740-1780)

Elisabeth Iere de Russie : impératrice de Russie (1741-1762)

Charles III d’Espagne : roi d’Espagne (1758-1788)

William Pitt « l’Ancien » (1708-1778) : Premier ministre britannique (lord du sceau privé).

Cardinal de Choiseul (1719-1785) : chef du gouvernement français.

Kaunitz (1711-1794) : chancelier autrichien.

Vaudreuil (1798-1778) : gouverneur de la Nouvelle-France.

Duc de Richelieu / Broglie / Montcalm / Lévis / prince de Soubise : généraux et maréchaux français.

Von Loudon / Browne / von Daun : feld-maréchaux autrichiens.

Joseph-François Dupleix (1697-1763) : Commandant général français en Inde.

Robert Clive (1725-1774) : gouverneur britannique en Inde.

Dates importantes :

28 mai 1754 : attentat de George Washington et Tanaghrisson sur le capitaine de Jumonville.

8 juin 1754 : piraterie de Boscawen.

16 janvier 1756 : traité de Westminster, premier acte de la Révolution diplomatique.

1er mai 1756 : 1er traité de Versailles, alliance franco-autrichienne.

27 juin 1756 : prise du fort Saint-Philippe par les Français à Majorque.

29 août 1756 : Frédéric II de Prusse lance son invasion de la Saxe.

23 juin 1757 : bataille de Plassey en Inde.

6 mai 1757 : bataille de Prague.

10 septembre 1757 : capitulation de Kloster Zeven.

5 novembre 1757 : bataille de Rossbach.

5 décembre 1757 : bataille de Leuthen.

Juillet 1758 : contre-offensive des Treize colonies contre la Nouvelle-France.

26 juillet 1758 : capitulation de Louisbourg.

1er août 1759 : bataille de Minden.

13 septembre 1759 : bataille des Plaines d’Abraham.

8 septembre 1760 : capitulation de Montréal, le Canada français n’existe plus.

25 octobre 1760 : mort de George II de Hanovre.

17 janvier 1761 : capitulation de Pondichéry.

5 janvier 1762 : mort d’Elisabeth Iere, tournant de la guerre en Europe centrale.

10 février 1763 : traité de Paris, fin de la guerre de Sept Ans.

Source (texte) :

Dziembowski, Edomond (2018). La guerre de Sept Ans. Paris : Perrin, 864p.

Articles affiliés :

Articles sur le contexte et les prémices de la guerre de Sept Ans
Article sur les années 1756 et 1757 dans la confrontation franco-britannique
Article sur les années 1756 et 1757 concernant la guerre en Europe centrale
Articles sur la guerre au-delà de l’Europe de 1757 à 1759
Article de la guerre en Europe centrale de 1758 à 1760
Article sur les dernières années de la guerre (1760-1762)
Article sur la conclusion de la guerre de Sept Ans (1761-1763)

Sources (images) :

https://fr.wikipedia.org/wiki/Fichier:Nouvelle-France_map-en.svg (colonies européennes en Amérique du Nord)

https://twitter.com/onlmaps/status/1096104303519911936 (carte globale de la guerre de 7 Ans)

http://assprouen.free.fr/fichiers/commentaires_historiques/LA_GUERRE_DE_SEPT_ANS_1756.pdf (carte simplifiée des comptoirs en Inde)

https://www.lhistoire.fr/carte/la-guerre-de-sept-ans-premi%C3%A8re-guerre-mondiale%C2%A0 (carte récapitulative de la guerre de Sept Ans)

Les commentaires sont clos.